successions franco anglaises

Testament français ou trust anglais ?

Selon le principe universel posé par le règlement européen entré en vigueur le 4 juillet 2012 relatif aux successions internationales, la succession d’une personne défunte est régie par la loi de l’Etat dans lequel elle avait sa résidence habituelle au moment de son décès.

Ainsi, par exemple, la succession d’un français vivant au Royaume-Uni de manière habituelle sera soumise à la loi anglaise.

Or, le Royaume-Uni a adopté un système dit de « scission » au terme duquel, les biens mobiliers successoraux sont soumis à la loi du domicile du défunt et les biens immobiliers successoraux à la loi de leur situation.

Ainsi, être domicilié au Royaume-Uni et disposer d’un patrimoine immobilier en France peut alors être source de complications et de conflits de lois.

En effet, dans ce cas, deux successions s’ouvrent : l’une en France et l’autre au Royaume-Uni, donnant ainsi naissance à une situation complexe du fait de la disparité de ces deux régimes successoraux.

C’est pourquoi, afin d’assurer le respect de ses propres dernières volontés, il fortement conseillé de rédiger un testament.

La rédaction d’un tel acte permet de disposer de la manière dont les biens d’une personne seront distribués après son décès mais également, en présence d’un élément d’extranéité, d’avoir la possibilité d’unifier les règles applicables à sa succession.

La législation européenne applicable à la France permet désormais de désigner, dans un testament, la loi de l’Etat dont une personne possède la nationalité comme étant la loi applicable à la dévolution de sa succession.

Ainsi, toute personne française résidant au Royaume-Uni a la possibilité de viser expressément la loi française. A défaut, le régime successoral anglais s’appliquera.

Choisir la loi applicable à la dévolution de sa succession implique d’avoir conscience des conséquences résultant de ce choix.

L’un des enjeux majeurs est relatif à la liberté de disposer de ses biens puisqu’en effet, celle-ci varie ostensiblement entre la loi française et la loi anglaise.

law properties

Selon le droit français, le testateur n’a pas le droit de priver ses héritiers de ce que l’on appelle la « réserve héréditaire ». Ce dispositif, qui est une limitation à la liberté de disposer, réserve à certains héritiers une part variable du patrimoine du défunt à condition que ces derniers acceptent la succession.

A contrario, la loi anglaise ne prévoit aucune règle similaire. Le testateur dispose d’une liberté totale pour organiser, de son vivant, la transmission de ses biens. Il est libre de gratifier un tiers comme il l’entend.

Récemment, la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 27 septembre 2017, a affirmé que « la loi successorale étrangère qui ignore la réserve héréditaire n’est pas en elle-même contraire à l’ordre public international français et ne peut être écartée que si son application concrète conduit à une situation incompatible avec les principes essentiels du droit français ».

Opter pour la loi anglaise et ainsi déroger au respect de la réserve héréditaire instaurée par le législateur français n’est donc pas contraire à l’ordre public français dès lors que cela n’aboutit pas à une situation inacceptable pour l’un des réservataires.

En définitive, choisir la loi applicable à la dévolution de sa succession revient donc à choisir la marge de liberté de disposer, en prenant en considération la composition de son patrimoine, le lieu de situation de ses biens immobiliers successoraux et les personnes dont on souhaite en faire bénéficier.

Que la dévolution d’une succession soit régie par le droit français ou par le droit anglais, il peut être opportun de nommer un exécuteur testamentaire.

En vertu du droit français, ce dernier sera uniquement chargé de veiller à la bonne exécution d’un testament.

En vertu du droit anglais, il sera également chargé de faire appliquer les volontés du défunt mais aura également un rôle plus accru. En effet, le testament appartient au testateur de son vivant, puis il revient à l’exécuteur testamentaire (ou à défaut, à un administrateur désigné par les juridictions anglaises).

L’une des particularités du système anglais tient donc au fait que les biens du défunt sont dévolus à l’exécuteur testamentaire qui pourra en disposer jusqu’à l’entier règlement de la succession.

Par conséquent, dans un contexte international, dès lors que la question de la rédaction d’un testament se pose, il est fortement recommandé de se rapprocher d’un avocat afin d’être conseillé sur le choix de la loi applicable ainsi que sur la distribution de ses biens successoraux. Ce dernier saura vous conseiller en collaboration avec un expert fiscaliste.

Il convient également d’être vigilant et de ne pas multiplier les testaments. L’existence d’un testament unique, conservé dans un seul pays, permet d’éviter des divergences d’interprétations.


By Lucile Bonhoure, Avocat Associée

LBK FRENCH LAW Avocats

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