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Il ne se passe pas une journée sans que les médias ne publient plusieurs articles alarmants sur les conséquences du Brexit à venir mais qu’en est-il vraiment depuis le referendum?

On nous a prédit un séisme immobilier, qu’il y aurait un avant et un après, que le marché allait changer dramatiquement… Force est de constater que le cataclysme pronostiqué par beaucoup n’a pas eu lieu…pour l’instant. Quatre mois se sont maintenant écoulés depuis le 23 Juin et tout va bien…presque comme avant.

Les chiffres de l’ONS (Office of National Statistics) sont sortis et sont plutôt encourageants. Les prix de l’immobilier en Angleterre ont augmenté de 9,2% sur les 12 mois qui précédent Aout 2016. Ils ont même augmenté de 12% à Londres ! Bien sûr, il faut être prudent car ces chiffres ne comptabilisent que 2 mois de l’après referendum et il faut bien 3 mois pour qu’une vente arrive à terme. Ils ne sont donc pas encore représentatifs de la période “after referendum”. Il y aussi des disparités importantes entre les différents quartiers, les “boroughs”.

Ainsi, le quartier de Camden a enregistré une baisse de 2.7%, celui de Hammersmith & Fulham une hausse de 1.9% mais les quartiers périphériques où le prix moyen est en dessous de £500K (prix moins élevés) ont vu ce chiffre s’envoler à plus de 12%.

Alors comment expliquer ces chiffres? Le premier élément de réponse, c’est toujours et encore un manque réel et très important de logements au regard de la demande toujours aussi forte. C’est le cas en particulier des primo-acheteurs, ceux qui achètent pour la première fois. 72% des locataires interrogés par l’ONS, ont dit avoir comme objectif principal de devenir propriétaires dans les 2 années à venir. Les loyers sont chers à Londres et la question pour ces “aspiring landlords” n’est pas “Est-ce le bon moment pour acheter?” mais “Est-ce que je suis en mesure d’acheter?”. Cette situation se trouve renforcée par la croissance économique (les derniers chiffres donnent une croissance du PIB de 0.5% sur la période Juillet à Septembre, ce qui est très satisfaisant), les taux d’intérêt historiquement bas ainsi que par la baisse importante du stamp duty (taxe à l’achat modifiée en Avril 2016) pour les biens moins chers.

De plus, cette baisse du stamp duty a modifié le comportement des investisseurs, notamment étrangers qui se sont désintéressés des biens de luxe pour acheter en plus grand nombre des appartements plus petits et moins chers, entrainant mécaniquement une hausse des prix sur ce segment de marché, essentiellement des appartements de 1 ou 2 chambres.

En revanche, dans les quartiers plus chics du centre de Londres, les prix se sont stabilisés en grande partie à cause de la hausse du stamp duty sur les biens chers (plus de £900K). Il en va de même sur le segment des maisons familiales où le nombre de transactions a baissé de manière significative. Les acheteurs, sous couvert de Brexit, essayent de négocier dure mais les vendeurs ne baissent pas et peuvent se permettre d’attendre du fait des taux d’intérêt très faibles. On observe donc un bon stock de maisons à vendre mais des prix qui ne baissent pas. Certains propriétaires choisissent de mettre leur bien sur le marché de la location, augmentant l’offre et participant de ce fait à une légère baisse des loyers.

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A quoi peut-on donc s’attendre pour les 2 ans à venir?

Il est probable que le marché oscille entre les effets d’annonce du gouvernement relayés par les médias. Un jour, les résultats économiques seront bons et les vendeurs auront le moral, le suivant une annonce ajoutera à l’incertitude et les acheteurs joueront la baisse. Ce phénomène de yoyo pourrait durer 1 an voire 2 ou 3 jusqu’à ce que les négociations du Brexit soient terminées. Au final, tant que les taux d’intérêt seront bas, qu’il manquera de logements et que Londres restera Londres, il est peu probable que les prix baissent, les propriétaires vendeurs s’accrochent à leurs trésors et ne sont pas prêts à les brader.

statut fiscal

Londres constituerait à ce jour la 6ème ville de France. Ce qui n’est pas étonnant puisqu’en plus d’être particulièrement dynamique, Londres (et le Royaume-Uni en général) présente de nombreux avantages fiscaux pour un français qui s’y expatrie. Alors qu’un britannique, résident au Royaume-Uni, y est imposable mondialement, un français qui s’y expatrie peut bénéficier d’une imposition limitée sur ses revenus et plus-values.

Le statut de résident fiscal anglais non domicilié

Un français s’expatriant à Londres devient en principe résident fiscal britannique (car notamment il passe plus de 183 jours par an au Royaume-Uni ou travaille à temps plein au Royaume-Uni, ou a son unique habitation au Royaume-Uni…) et non domicilié car son père n’est pas britannique (et l’expatrié n’envisage pas de vivre de manière permanente ou indéfinie au Royaume-Uni). Un point important est que cette personne devra vérifier qu’il a bien cessé sa résidence fiscale en France.

L’avantage d’avoir le statut de résident non domicilié est qu’il pourra bénéficier de la règle de la remittance basis. La règle de la remittance basis signifie qu’il sera imposable sur ses revenus et plus-values de source britannique mais pas sur ses revenus et plus-values de source étrangère à la condition de ne pas les rapatrier au Royaume-Uni.

Cette règle semble simple mais est compliquée à mettre en place et en pratique.

 


Comment opter pour la remittance basis ?

La demande se fait chaque année dans la déclaration d’impôt (self assessment return). Elle est gratuite les sept premières années de résidence. Pour continuer à en bénéficier au-delà, il faut acquitter un forfait annuel (annual remittance basis charge) de £30,000 jusqu’à la douzième année de résidence, et de £60,000 jusqu’à la quinzième année. Cependant, à partir du 6 avril 2017, à compter de la seizième année de résidence, un français expatrié deviendra automatiquement deemed domiciled et sera par conséquent imposé mondialement au Royaume-Uni. La remitance basis prendra donc fin après quinze années de résidence.

A noter, que les contrats d’assurance vie sont en dehors du champ d’application de la remittance-basis, et que les rachats (excédant 5% du capital initial) sont imposables au Royaume-Uni qu’ils soient ou non rapatriés.

 


La remittance basis et la ségrégation des comptes

Par une fiction juridique tout le patrimoine, avant l’arrivée au Royaume-Uni, est considéré comme du capital pur rapatriable au Royaume-Uni à tout moment sans imposition au Royaume-Uni. Ce capital doit être ségrégué dans un capital account.

En vertu de la remittance basis, aucun impôt n’est exigible au Royaume-Uni sur les revenus et gains réalisés à l’étranger à compter de son arrivée (tels que les intérêts bancaires, des dividendes, des revenus de portefeuilles, des revenus fonciers, plus-values…), sous réserve de ne pas les rapatrier au Royaume-Uni, et qu’ils aient été correctement ségrégués (c’est-à-dire isolés dans des comptes dédiés). Sans cette ségrégation, les revenus et gains générés seraient mélangés au capital initial qui deviendrait donc du mixed capital imposable à hauteur des revenus et gains réalisés en cas de rapatriement (à noter que pour les produits de cession, il est dans tous les cas impossible de dissocier la plus-value réalisée du capital initial investi).

 


Prenons pour exemple une personne qui bénéficie de la remittance basis et qui perçoit des revenus fonciers de source française.

Dans tous les cas, cette personne continuera d’être imposée en France à l’impôt sur le revenu (taux minimum de 20%) et aux contributions sociales (taux de 15.5%).

Tous les revenus fonciers perçus avant son arrivée au Royaume-Uni constituent du clean capital à isoler dans un compte clean capital. Ils sont rapatriables à n’importe quel moment au Royaume-Uni sans imposition.

En revanche tous les revenus fonciers générés après l’arrivée au Royaume-Uni constituent du revenu à ségréguer dans un compte income situé en dehors du Royaume-Uni. Si cette personne ne rapatrie pas ses revenus fonciers au Royaume-Uni, dans ce cas il n’y aura pas d’imposition au Royaume-Uni. Mais en cas de rapatriement, elle sera imposable à l’income tax (taux maximum de 45%) avec un crédit d’impôt égal à l’impôt payé en France (sauf les contributions sociales) grâce à la convention fiscale franco-britannique du 19 juin 2008.

Si les revenus fonciers sont mélangés avec du capital sur un même compte, et qu’une partie de ces liquidités est rapatriée, dans ce cas les revenus fonciers sont considérés être rapatriés en priorité et il y aura donc imposition à hauteur du montant de ces revenus fonciers.

La ségrégation des comptes n’est donc pas si facile à mettre en place en pratique. Il est important de s’adresser à une banque qui a l’habitude de ségréguer les comptes et prendre conseil auprès d’un avocat spécialisé au Royaume-Uni pour mettre en place cette ségrégation et bénéficier au mieux de la remittance basis.

 

Londres, juillet 2016

Cet article a une vocation générale et ne peut en aucun cas se substituer à une consultation pour une situation particulière.

 

Caroline Cohen
caroline.cohen@tflp-london.com 

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